19 territoires slectionns pour exprimenter en 2023 le RSA sous condition dactivit


Le gouvernement qui visait une dizaine de territoires pilotes a finalement sélectionné 19 territoires métropolitains et d’outre-mer (18 départements et la métropole de Lyon) pour tester en 2023 le versement du revenu de solidarité active (RSA) sous condition d’activité. Sélectionnés parmi les 43 conseils départementaux qui ont fait acte de candidature avant la date limite du 21 octobre 2022, les lauréats vont ainsi mettre en œuvre dans les semaines à venir un dispositif qui conditionne le versement du RSA à l’effectivité d’une période de 15 à 20h d’activités hebdomadaires au profit d’une entreprise ou d’une collectivité ou bien pour de la formation, destiné à renforcer l’insertion des allocataires.

Mesure défendue par le candidat Emmanuel Macron à l’occasion de la dernière campagne présidentielle, le versement du RSA sous condition va donc prendre la forme d’une expérimentation sur douze mois. Le nouveau dispositif s’inscrit dans le cadre du chantier de France Travail confié au haut-commissaire à l’emploi et à l’engagement des entreprises, Thibaut Guilluy qui porte la mission de concertation et de préfiguration du futur guichet unique de l’emploi en France.

Un comité de suivi créé par Départements de France

Les territoires qui vont expérimenter ce dispositif rénové d’accompagnement des allocataires du RSA ont été retenus avec le souci, justifie le ministère, de refléter "une pleine diversité sur le plan géographique, démographique et social". Il s’agit de l'Aisne, l'Aveyron, les Bouches-du-Rhône, la Côte-d'Or, la Creuse, l'Eure, l'Ille-et-Vilaine, la Loire-Atlantique, le Loiret, la Mayenne, la Métropole de Lyon, le Nord, les Pyrénées-Atlantiques, La Réunion, la Seine-Saint-Denis, la Somme, les Vosges, l'Yonne et les Yvelines. Le ministère du Travail annonce pour les prochaines semaines la finalisation du cahier des charges de "l’accompagnement rénové" qui sera testé en 2023 sur les territoires pilotes.

Départements de France a réagi à cette annonce ministérielle en rappelant que les territoires candidats s’étaient réunis la semaine dernière pour s’accorder sur les conditions de cette expérimentation. L’association a également décidé de mettre en place un comité de suivi destiné à mesurer la faisabilité de cette réforme ainsi qu’à mutualiser les retours des départements sélectionnés. Elle souhaite à ce titre que ceux qui n’ont pas été retenus puissent néanmoins être associés à cette démarche.

ATD Quart Monde redoute la "stigmatisation des allocataires"

S’agissant de la gouvernance du dispositif expérimental en tant que tel, Départements de France plaide pour une coprésidence assurée par le préfet et le président du département concerné. Mesure à laquelle le gouvernement serait favorable, soulignent les départements qui entendent dans le même temps "rester responsables de leur politique de suivi des droits et devoirs, pouvant conduire à la réorientation des allocataires, ou à une sanction". Sujet sur lequel ATD Quart Monde a réagi en disant craindre un risque de "stigmatisation des allocataires" qui seraient seuls parmi les demandeurs d’emploi à devoir se soumettre à ce type de mesure. "L’idée avancée par certains responsables politiques que le plein-emploi ne dépendrait que de la motivation des personnes privées d’emploi ne tient pas", argue l’association.

  • Les précisions du haut-commissaire Thibaut Guilluy

Comment l'expérimentation va-t-elle être mise en oeuvre ?

Thibaut Guilluy - Sur chacun des territoires pilotes, le premier principe sera d'accompagner tous les bénéficiaires du RSA, à la fois ceux qui y rentrent mais aussi ceux qui y sont depuis longtemps. L'objectif est de les inscrire systématiquement à Pôle emploi - seuls 40% le sont actuellement - et d'organiser la partie diagnostic et orientation en moins d'un mois contre trois aujourd'hui. Selon la Cour des comptes, 7 ans après leur entrée au RSA, 42% des personnes y sont encore et seuls un tiers ont retrouvé un emploi. Le deuxième principe est de démarrer au niveau des bassins de vie et des bassins d'emploi pour en faire le coeur opérationnel de l'action d'inclusion, d'emploi et de formation. Les deux bassins sont liés : derrière l'emploi, il y a les enjeux de garde d'enfants, de mobilité, de logement, de santé... Les départements ont identifié un territoire : ce sera Saint-Nazaire pour la Loire-Atlantique, Saint-Quentin-en-Yvelines pour les Yvelines... Pour la Creuse, c'est le département entier. Au total, cela concernerait environ 40.000 personnes sur 2 millions de foyers bénéficiaires.

Quels changements pour les bénéficiaires du RSA ?

On va construire des accompagnements avec les départements. Pour ceux qui ont besoin d'une prise en charge principalement sociale, ce sera plutôt par les travailleurs sociaux du département avec Pôle emploi en appui. A l'inverse, pour ceux qui sont proches de l'emploi, ce sera un accompagnement Pôle emploi avec un appui social. Les allocataires signeront un contrat avec des droits et devoirs sur le modèle du Contrat d'engagement jeune. Dans les 15-20 heures d'activité hebdomadaire, l'idée est que chaque jour le bénéficiaire ait un programme pour aller de l'avant et se rapprocher de l'emploi. Pour une personne en grande difficulté, on va commencer par des ateliers logement et santé. Après, il y aura des immersions en entreprise et on mettra le paquet sur les formations. C'est un socle commun qui sera adapté aux réalités de chaque territoire et de chaque public, qui ne sont pas les mêmes en Aveyron ou en Seine-Saint-Denis. On investira dans l'accompagnement car ça ne peut marcher que si un conseiller suit 40 à 50 personnes, pas 150 ou 200. Donc il y aura des renforts humains.

Vous voulez en faire une préfiguration de France Travail, qui doit cordonner en 2024 tous ceux qui s'occupent des chômeurs sur un territoire. Comment faire pour que les acteurs travaillent ensemble ?

Si les systèmes informatiques de Pôle emploi et du département ne se parlent pas, les gens ne peuvent pas travailler ensemble. On a préparé en amont une première base d'outils numériques pour travailler ensemble plutôt que chacun dans son silo. Les conseillers doivent pouvoir identifier l'ensemble des offres de services des acteurs sur un territoire, ce qui est aujourd'hui peu accessible. Sur l'expérimentation, on est dans un co-pilotage Etat/département. Les régions pourront intervenir sur la formation et les collectivités locales sur les problématiques de garde d'enfant. Ensuite il y aura un partage des données pour voir ce qui fonctionne. L'idée est de monter en puissance jusqu'à une généralisation d'ici la fin du quinquennat.

Propos recueillis par l'AFP

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